Le secret pour léguer aux petits-enfants sans indivision

 

Maître de Ravel d'Esclapon nous livre quelques pistes pour préparer sa succession

 
 

Une grand-mère souhaite transmettre à ses petits-enfants. La première question est de savoir si elle va transmettre de son vivant ou à son décès ? La première solution est souvent plus avantageuse fiscalement mais va engendrer un coût immédiat de donation, et, civilement, une – relative – complexité de mise en œuvre immédiate. La solution de la transmission à son décès donc par voie testamentaire pourra être retenue en définitive.

Le coup de pied

Si le patrimoine de la grand-mère est suffisamment liquide les petits-enfants pourront recevoir du numéraire. Mais, le patrimoine des Français étant souvent surpondéré en immobilier, la crainte est alors celle de l’indivision : les enfants et les petits-enfants se retrouvent avec des droits concurrents sur les mêmes biens notamment immobiliers. De là, la lourdeur sinon la paralysie de gestion sont à redouter sans même envisager le pire, mésentente et enfant mineur !

Le coup de maître

Ma solution consiste à ce que les enfants reçoivent l'intégralité du patrimoine mais à charge de reverser des capitaux aux petits-enfants. De sorte, les enfants gardent la main, le pouvoir notamment de décider du devenir des biens. Des legs d’attribution peuvent limiter voire supprimer toute indivision entre eux. Par exemple, le testament reconnaîtra à Pierre, la résidence principale, à Julie et Marie, la résidence locative et à Alain, la résidence secondaire. Les petits-enfants sont seulement créancier donc en valeur et non en nature. Finement rédigé, le testament va détailler les modalités de chaque créance (par exemple, la date d'exigibilité différée à l'anniversaire de leurs 30 ans, les limites à l'emploi des capitaux, le cas des prédécès...). L’intérêt du différé d’exigibilité est de faciliter le paiement pour les enfants qui héritent d’un patrimoine peu liquide.

Pour aller plus loin

Fiscalement, l’opération est avantageuse car les successibles - héritiers que sont les enfants et légataires que sont les petits-enfants - vont bénéficier pleinement de la progressivité de l’impôt successoral. Plutôt que de transmettre aux enfants sur la tranche, par exemple, marginale de 30%, les petits-enfants recevront également sur les toutes premières tranches. Ce schéma n’est pas sans rappeler les excellentes transmissions transgénérationnelles aux petitsenfants mais avec réserve d’usufruit au profit de l’enfant dit pivot. Très économique fiscalement, la grand-mère sécurise son patrimoine dans une société civile et conserve un usufruit pour elle puis pour ses enfants. Les enfants sont donc les nu-propriétaires de parts sociales doublement grevées d’usufruit. Sur la forme, le testament devra – comme tout testament – éviter la forme olographe. C’est, des quatre formes de testament, la moins sûre ! Elle est, hélas, souvent en vigueur, même chez certains notaires. La rédaction devra intégrer les cas, heureux, des naissances de petits-enfants et, malheureux, de décès tant d’enfant que de petit-enfant.

Pour ne pas conclure

« Me rappeler qu’un jour, je serai mort, c’est l’outil le plus important que j’ai trouvé pour prendre de grandes décisions dans ma vie. Car presque tout : les attentes des autres, l’orgueil, la peur du ridicule ou la peur de l’échec cesse d’exister devant la mort, il ne reste que le plus important » (Steve Jobs). En effet, nous pouvons dans un contexte de famille harmonieux favoriser une transmission à la prochaine génération en jouant la souplesse du testament et la douceur de la transmission en valeur.

Maître Antoine de RAVEL d’ESCLAPON, Docteur en Droit, Enseignant en Gestion de Patrimoine & Notaire du Conseiller Patrimonial


 
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