Exit Tax
Un dispositif pour dissuader les contribuables de quitter la France
L'exit tax, instituée en 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy et modifiée en 2019 par Emmanuel Macron, est un dispositif fiscal emblématique de la lutte contre l'évasion fiscale. Sa mise en place vise à dissuader les contribuables français désireux de s’expatrier vers des cieux fiscaux plus cléments, où les charges fiscales seraient allégées. Ce mécanisme vise à freiner les départs fiscaux en permettant à l'administration fiscale de suivre les plus-values latentes des contribuables, même après leur départ de France.
Les conditions d'application de l'exit tax
L'exit tax cible les contribuables français qui transfèrent leur résidence fiscale hors de France. Ce dispositif s'adresse principalement aux personnes possédant un patrimoine financier important. Ainsi, seules les personnes répondant aux deux conditions cumulatives suivantes sont redevables de l'exit tax :
Durée de Résidence Fiscale en France (1) : Le contribuable doit avoir été résident fiscal en France pendant au moins six des dix dernières années précédant son départ.
Seuil Patrimonial (2) : Le contribuable doit détenir, avec les membres de son foyer fiscal, plus de 50 % des droits dans les bénéfices d'une société ou posséder un patrimoine supérieur à 800 000 euros en valeurs mobilières françaises ou étrangères (actions, parts sociales, obligations).
À noter (1) : L'exit tax vise à rendre immédiatement imposables les plus-values latentes, les créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix, ainsi que les plus-values en report d'imposition. La condition de durée de domiciliation en France s'applique uniquement aux plus-values latentes. En revanche, les plus-values en report d'imposition et les créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix sont concernées par l'exit tax sans qu'une condition de durée de domiciliation en France soit nécessaire.
À noter (2) : les titres détenus au travers d’un PEA, d’un contrat d'assurance-vie ou d’un contrat de capitalisation, ainsi que les titres de sociétés à prépondérance immobilière soumises à l'impôt sur le revenu et les plus-values immobilières, sont exclus du champ d'application de l'exit tax.
L'Imposition des Plus-Values Latentes
Lors du transfert du domicile fiscal, l'exit tax permet à l'administration fiscale d'imposer les plus-values latentes sur les actifs détenus par le contribuable. Concrètement, les plus-values latentes, les créances résultant d'une clause de complément de prix, ainsi que les plus-values en report d'imposition, sont soumises à imposition au moment du départ.
Le transfert de la résidence fiscale entraîne une imposition immédiate des plus-values latentes, soit au barème progressif de l'impôt sur le revenu sur option, soit au taux forfaitaire de 12,8 % pour l’impôt sur le revenu, auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux de 17,2 %, soit un taux global de 30 %.
Le Sursis de Paiement
En principe, l’exit tax est exigible dès le transfert du domicile fiscal hors de France. Toutefois, le contribuable peut bénéficier d’un sursis de paiement, un mécanisme permettant de différer l’exigibilité de l’impôt. Le sursis de paiement peut être automatique ou accordé sur demande, en fonction du pays dans lequel le contribuable transfère son domicile fiscal.
Le sursis de paiement automatique : lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal dans un pays de l'Union européenne (UE) ou un pays ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscale, ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement (Australie, États-Unis, Madagascar, Maroc, Polynésie française, Taïwan…), le sursis de paiement s’applique de manière automatique. La liste des pays hors UE éligibles au sursis de paiement automatique est disponible ici.
Le sursis de paiement sur demande : lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal dans un autre pays, c’est-à-dire dans un État ou territoire non coopératif (ETNC) ou un État ou territoire hors UE n’ayant pas conclu avec la France une convention d’assistance en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ou une convention d’assistance au recouvrement, il peut bénéficier d’un sursis de paiement sur demande. Cette demande est faite via le formulaire n° 2074 ETD et doit être déposée auprès du service des particuliers non-résidents au plus tard 90 jours avant le départ hors de France. Pour prétendre au sursis de paiement, le contribuable doit fournir une garantie au Trésor public, telle qu’une hypothèque, un nantissement ou un séquestre, destinées à assurer le recouvrement de l’impôt, et désigner un représentant fiscal en France.
En cas de transferts successifs dans un État éligible au sursis de paiement automatique, puis dans un État éligible au sursis sur demande, une demande doit être faite au plus tard 90 jours avant le deuxième transfert.
Obligation déclarative
Le dispositif de l'exit tax repose sur deux déclarations principales :
La déclaration n°2074-ETD : elle doit être souscrite lors du transfert du domicile fiscal hors de France. Elle permet de déclarer les plus-values latentes, les créances issues d'une clause de complément de prix, ainsi que les plus-values en report d’imposition détenues à la date du départ fiscal.
La déclaration n°2074-ETS : elle doit être soumise chaque année suivant le transfert du domicile fiscal si le contribuable bénéficie d'un sursis de paiement. Cette déclaration permet d’assurer le suivi des impositions liées à l’exit tax.
Les deux déclarations doivent être déposées dans les mêmes délais que la déclaration de revenus. En outre, il convient de reporter, dans la case 8TN de la déclaration 2042C, le montant total des droits en sursis de paiement.
Dégrèvement ou remboursement de l’exit tax
Dans certains cas, le contribuable peut bénéficier d’un dégrèvement de l’impôt en sursis de paiement, c’est-à-dire d’une réduction de l’impôt dû, ou d’un remboursement de l’exit tax si celle-ci a été acquittée lors du transfert de domicile. Tel est le cas lorsque le contribuable revient en France et conserve toujours les titres concernés dans son patrimoine, lorsqu'il effectue une donation de ces titres, à condition que cette donation ne poursuive pas un objectif principalement fiscal, ou en cas de décès, sous réserve que les titres fassent partie du patrimoine du défunt. Il en est de même lorsque le contribuable atteint l’échéance d’un délai de 2 ans si la valeur totale des titres soumis à l’exit tax est inférieure à 2 570 000 euros, ou de 5 ans si elle est supérieure à ce montant.
À noter : pour les départs intervenus entre le 1er janvier 2014 et le 1er janvier 2019, le délai de conservation des titres est porté à 15 ans.
Pour mémoire : pour les départs intervenus entre le 3 mars 2011 et le 31 décembre 2013, le délai de conservation des titres était de 8 ans.
Perte du Bénéfice du sursis d’Imposition
Le non-respect des conditions requises pour bénéficier du sursis d’imposition, ainsi que la cession ou la donation des titres concernés par l’exit tax (sauf si cette donation n’a pas un but principalement fiscal), entraîne la perte du sursis d’imposition et rend l’impôt immédiatement exigible.
Conclusion
En conclusion, l'exit tax constitue un instrument essentiel de la politique fiscale française, visant à dissuader les transferts de domicile fiscal motivés par des objectifs d’évasion fiscale. Ce mécanisme, bien qu'étant spécifique à la France, n'est pas isolé, puisque d'autres pays tels que les États-Unis, les Pays-Bas, l'Allemagne ou encore le Portugal ont instauré des dispositifs similaires pour freiner la fuite des contribuables vers des juridictions fiscales plus clémentes. Pour toute personne envisageant de s’expatrier, il est essentiel d’être accompagnée par un expert afin de prendre en compte les implications de l'exit tax et d'optimiser la gestion de ses obligations fiscales à l'international.